Jardin d’été

Bande annonce du film Jardin d’été – Ciné-club Chablaisien Bande annonce

Durée

1h50

Réalisation

S. Sômai

Pays

Japon

Année de sortie

1994

Pendant leurs grandes vacances, dans un Kobe écrasé de chaleur, trois jeunes amis en mal d’aventures se questionnent sur la mort et se passionnent peu à peu pour le jardin abandonné d’un ermite qui les fascine. Ils se mettent en tête de lui rénover sa maison délabrée. Petit à petit, les trois garçons et le vieil homme se lient d’amitié. Ce jardin d’été sera leur terrain de jeu le temps d’un été inoubliable. 

Le film

Adapté d’un roman pour la jeunesse de Kazumi Yumato, Jardin d’été est le onzième long métrage de Shinji Somaï. On peut donc légitimement le considérer comme une œuvre de maturité (forcément relative étant donnée la disparition prématurée du cinéaste), et il est tentant de le considérer ainsi précisément parce que c’est aussi l’un des plus déliés, heureux et lumineux de son auteur. Somaï se met à hauteur d’enfants et comme au défi de déployer autrement sa propre virtuosité : réalisé juste après Déménagement (1993), inouï par l’ample et profond mouvement qui accompagne la transformation de sa jeune héroïne, Jardin d’été offre en contrepoint une forme de modestie charmante, une simplicité un peu hirsute comme le jardin dont s’occupent les enfants, mais qui s’avère aussi précise et bouleversante.

Le mouvement d’approche de la maison et de son habitant capte une humeur enfantine où l’imagination et la curiosité s’emparent des écoliers : avec la filature dans la rue et au supermarché, la frousse d’un des trois garçons dans les couloirs d’un hôpital qui lui paraît hanté, les moments où les enfants écrasés de soleil tournent autour du mur effondré et s’approprient les lieux par incursions furtives dans le jardin, les enfants vont au-devant de leur propre initiation. L’énergie demandeuse des enfants va se trouver canalisée par leur rencontre avec le vieil homme, qui en trois mouvements apprivoise le trio et lui suggère une série de travaux, dans lesquels il s’engage avec sérieux et enthousiasme. Et à la profondeur d’une certaine solitude enfantine, dans Déménagement, succède ici la réponse immédiate à l’amitié du vieux, une façon d’être en prise avec l’ici et maintenant, et avec l’autre. Les corps sont mis gaiement au travail, occasion pour eux d’éprouver, d’explorer et d’apprendre, tout comme d’ailleurs les jeunes acteurs au tournage. Le film s’installe dans un présent très joyeux, celui de l’expérience. (Florence Maillard)

« Il y a chez Sômai un travail sur la durée mais également sur la matière, la pesanteur, ce qui résiste au cliché et à l’imagerie. Une volonté de toucher presque physiquement le spectateur, de l’étreindre, par une intensité, une émotion qui traverserait l’écran. D’où cet art de laisser palpiter l’énergie éruptive de la jeunesse, et des corps soumis à toutes sortes d’épreuves et d’efforts, que sa caméra mobile et son art réputé du plan long (plans-séquences, panoramiques virtuoses etc.) captent dans le vif de l’action. C’est un cinéma du geste répété, qui, suprême subtilité, renseigne bien mieux que la psychologie elle-même. Un art de la bifurcation aussi : ses films n’en finissent pas de se réinventer en cours de route, à l’aune de scènes-pivots, qui les font basculer vers autre chose. » (Nathalie Dray, Libération)